top of page

La généalogie, bien plus qu'une recherche de noms

Il y a une dizaine d'années de cela, j'étais moi-même à la recherche de réponses pour compléter

ma propre généalogie. Je ne retrouvais pas le décès de mon arrière-arrière-grand-père maternel, Auguste Henri BLOT.


Il faut dire qu'à l'époque, j'étais encore amateur et que je me refusais à écrire – par facilité, selon moi – aux mairies, bien que je sus que la réponse se trouvait là, dans l'une des petites villes de la Sarthe ou de l'Orne où il avait passé une partie de sa vie. Je préférais, de loin, trouver moi-même la réponse directement dans les archives, pour peu qu'elles soient numérisées. Et pour cela j'étais prête à patienter.


Pour ce cas-là, comme la réponse restât plusieurs années indisponible en ligne, j'avais décidé d'attendre l'occasion de pouvoir me rendre aux archives de l'Orne et de la Sarthe, afin d'y faire des recherches complètes sur mes origines. Un pèlerinage m'attendait : d'abord l'Orne, où j'avais retrouvé la trace de mes plus anciens ancêtres, en particulier ce fameux Jullien BLOT qui me donne tant de fil à retordre depuis des années que je le recherche...


C'est à Ceton que j'espérais retrouver la trace de mon ancêtre Auguste. Il y avait vécu a moins dix ans au début des années 1900, avant que je perde sa trace puisque les recensements après 1911 n'étaient pas en ligne. Ni le reste d'ailleurs. Bien sûr, la numérisation des archives a évolué depuis. La visite du cimetière ne me permit pas de retrouver sa sépulture, ni celle de son épouse, Maria Angelina CHAIX, que je savais encore vivante après guerre. Mais en 2015, il n'y avait déjà plus beaucoup de tombes anciennes dans le cimetière.


Son nom ne figurait pas non plus sur le monument aux morts, mais il n'y avait de toute façon aucune plaque concernant les victimes civiles et, étant donné son âge, il ne pouvait figurer parmi les soldats tués au combat.


Aux archives départementales, j'avais cet objectif prioritaire : retrouver la trace d'Auguste. Je savais qu'il avait exercé les différents métiers de charron et de tisserand, et que c'est en tant que charron qu'il était connu à la fin de sa vie. C'était à l'époque de la première Guerre mondiale. J'avais pu cibler une période entre 1912 et 1918 grâce aux mariages de ses enfants. Mes souvenirs d'alors sont un peu flous, mais je pense avoir retrouvé la date de son décès dans les tables décennales de Ceton. Une première victoire.


Je me souviens cependant que je devais aller chercher cet acte en mairie car les registres de cette époque n'étaient pas versés aux archives. En attendant, je tentais ma chance dans la presse locale ; j'espérais y trouver une publication d'état-civil ou un faire-part. Peut-être cela m'apprendrait-il quelque chose ?


En parcourant ainsi la presse ornaise du XXème siècle (l'Echo de l'Orne), je me suis perdue à la lecture des articles de l'époque, m'imprégnant un peu plus de l'histoire locale. Et puis un titre attira mon attention : « CETON – un homme carbonisé ». Il faut préciser que mon mémoire de maîtrise portait sur les actes incendiaires et la pyromanie, et que la mention du feu, sous toutes ses formes, a toujours fait écho en moi. Voici l'article :

article de presse de 1917 relatant qu'un homme est mort carbonisé dans l'Orne
L'écho de l'Orne, parution du 3 novembre 1917 (source : Archives départementales de l'Orne)

Je me souviens de cette étrange impression qui s'est emparée de moi en salle de lecture à ce moment-là : j'étais à la fois interdite et... excitée ! Je venais de retrouver la trace concrète du décès d'Auguste ! Mais quelle douche froide ! Carbonisé !

Les premières lignes m'ont tout de suite fait penser à un meurtre. On ne se refait pas, mes études de criminologie ont laissé des traces :-)


Alors, et malgré les dernières phrases du journaliste, j'ai continué à éplucher la presse : s'il y avait eu meurtre, il y avait eu enquête, et donc des articles dans la presse ! J'avoue avoir été déçue : plus un article concernant mon ancêtre après cela.


Non pas que je me sois réjouie d'un acte atroce, mais il faut bien avouer que les recherches généalogiques, c'est aussi ça : trouver des événements inhabituels qui ont jalonné l'existence de nos ancêtres. Ce sont ces découvertes qui rendent les recherches passionnantes. Elles nous permettent d'imaginer plus facilement la vie de ceux qui nous ont précédé, elles nous attristent parfois, et nous font rêver d'autres fois.


Jusque-là, j'ai longtemps pensé que ma généalogie avait peu d'intérêt : aucun fait notable, pas d'ancêtre illustre, et donc pas d'archive exceptionnelle. Rien que des cultivateurs dans ma famille, aussi bien dans la branche paternelle que maternelle.


Quelle naïveté de ma part ! Je ne me rendais pas compte que toute histoire possède sa propre richesse. Je n'étais simplement pas allée au fond des choses. Car la généalogie, ce n'est pas juste la recherche de noms, de dates et de lieux. Cela suffit pour faire son arbre généalogique, certes, mais ce n'est que la partie visible de l'iceberg. Tout le reste, tout ce qui fait l'histoire de nos ancêtres se trouve enfoui ailleurs. Dans les archives, dans la presse, dans l'histoire de leur village et de leur pays, dans leur métier, et dans tellement d'autres sources ! C'est à partir de ce constat que j'ai pleinement pris la mesure de l'intérêt des recherches généalogiques.

Pour en revenir à mon arrière-arrière-grand-père, il fut très certainement pris de malaise et tombé dans l'âtre de son foyer (les maladies cardiaques ne sont pas rares dans ma famille, peut-être une piste ?). C'était un accident domestique. Mon arrière-arrière-grand-mère, Maria Angelina CHAIX, s'était absentée plusieurs jours. Je n'ai pas encore découvert pourquoi – tant d'hypothèses sont plausibles – et sans doute ne le saurai-je jamais.

Voici ce que j'ai appris plus tard en allant chercher son acte de décès à la mairie de Ceton :


Acte de décès de BLOT Auguste Henri décédé le 28 octobre 1917
Acte de décès de BLOT Auguste Henri (source : mairie de Ceton (61))

« le 26 octobre 1917 à dix heures du matin, Auguste Henri BLOT, né à Avézé (Sarthe) le 21 janvier 1851, charron, fils de François Siméon BLOT et de Éléonore MORISSE, époux de Maria Angélina CHAIX, a été trouvé décédé des suites de brûlures, en son domicile de la Barre, et dont la mort paraît remonter à deux jours [...] ».


Voilà une partie de l'histoire de mon aïeul, et pas la plus heureuse, cela va sans dire.

Ainsi, la généalogie peut nous apporter toute sorte de surprises. Quelles seront les vôtres ?

Posts récents

Voir tout

2 Comments


Unknown member
Aug 07, 2023

Bonjour, j'ai vécu une expérience similaire avec un article de journal du Petit Marseillais du 3/07/1889 qui relatait une cour d'assise qui condamnait un charron qui avait tué d'un coup de pelle un cocher sur Nice. C'est ce que nous avions dans la transmission familiale du côté maternel pour mon arrière grand-père. J'ai pu grâce à cet article trouver l'acte du décès de mon AGP

Like
Replying to

Bonjour et merci pour votre commentaire,

En effet, la presse peut se révéler être une mine d'informations. Elle est - selon moi - une source trop souvent négligée.

Like
bottom of page