Pour l'ouverture du challenge A/Z :

Angèle est un prénom.

Un prénom féminin dont les porteuses sont célébrées le 27 janvier. Angèle vient du grec «angelos» qui signifie le « messager ». C'était un prénom très porté par les filles entre la fin du XIXème siècle et le début du XXème siècle.

Pour moi, Angèle, c'est une jeune femme en particulier, une jeune sarthoise qui vivait à Teillé, dans le canton de Ballon au début du XXème siècle, justement.

Angèle était aussi le prénom d'une domestique employée par sa famille en 1881. Elle avait alors 19 ans, était donc née vers 1862. il s'agissait peut-être d'Angèle Louise GROSBOIS, née en 1863 à Savigné-Lévêque, l'une des filles d'Auguste, veuf en 1872, domicilié à La chapelle-Saint-Rémy et père de quatre jeunes enfants. Nul doute que ceux-ci aient cherché des places de domestiques pour subsister.

Mais Angèle, c'est avant tout une énigme...

Angèle était la fille de François Pierre BRARD et de Joséphine Léontine GASCHE. Tout ce que je sais d'elle, c'est qu'en 1911, elle était cultivatrice et travaillait comme aide auprès de sa mère, veuve depuis 1908. C'est le recensement qui m'apprend cela.

D'après ce document, Angèle serait née vers 1872 à Teillé. Or, les tables de Teillé ne nous donnent aucune naissance pour une Angèle BRARD entre 1863 et 1883.

Un coup d’œil sur le recensement précédent nous indique une Angèle née dix ans plus tard, toujours à Teillé, aide de culture.

Une erreur ? Vraisemblablement, c'est fréquent. Mais lequel de ces recensements dit vrai ? En tous cas, elle ne semble pas née à Teillé. Je sais, par mes recherches, que la famille a bougé : le couple parental s'est uni à Nouans en 1872 avant de s'installer à Ballon pour au moins quatre années. Ensuite, entre 1876 et 1877, la famille est partie à La Chapelle-Saint-Rémy. Retour à Ballon vers les années 1886 et, deux ans plus tard, l'arrivée à Teillé jusqu'au début du XXème siècle.

Un petit tour dans l'état-civil de Nouans et de Ballon ne donne pas de résultat plus probant quant à retrouver cette Angèle...

Le recensement de la population de Teillé de 1901 mentionne, lui, une Angèle BRARD née vers 1892. Or, il y a bien une Angèle Armandine BRARD sur les tables, née le 17 septembre 1891. Avec Armand Eugène qui naîtra en 1895, c'est la petite dernière de la famille. Cette Angèle-là va trouver un époux et fonder une famille à partir de 1913. Il serait donc plausible de la retrouver avec sa mère et Armand en 1911, mais alors c'est l'âge qui ne correspond plus.

En 1911, pas d'autre Angèle dans la commune, et de BRARD, il ne reste qu'Alphonse, domestique dans une ferme, ainsi que Léontine et son fils Armand, comme nous l'avons vu plus haut. Les autres membres de la famille se sont dispersés. Léontine (1874), l'aînée, est domestique à Ballon et s'établira avec son époux à Ballon dès 1918. Sa cadette, Louise (1876), travaille dans la ville du Mans ; elle s'installera elle aussi à Ballon, rue Saint Laurent, une fois mariée en 1908.

La troisième sœur, Delphine, est décédée en 1903.

Ne restent qu'Augustine, née en 1882 et notre Angèle née en 1891. A l'une correspond la date de naissance, à l'autre le prénom...

Jusqu'en 1901, toutes deux restent domiciliées avec leurs parents. Suivons ensuite la trace d'Augustine. Elle s'est mariée en 1904 à Teillé avec Hippolyte FOUCAULT. Le recensement de Neuvilette-en-Charnie de 1911 nous apprend qu'elle a ensuite vécu plusieurs années à Maresché où elle a donné naissance à plusieurs enfants.

Cet autre recensement nous apprend que le couple a vécu à Rouez-en-Champagne, puis à Mézières-sous-Lavardin :

Nous pouvons donc exclure qu'Angèle et Augustine soient la même personne.

Ne reste donc qu'Angèle Armandine pour être... notre mystérieuse Angèle. Pourtant, les incohérences liées aux dates de naissance présumées dans les recensements de Teillé de 1906 et 1911 ont engendré un doute raisonnable, car si les erreurs sont fréquentes à quelques années près, elles ne le sont pas à neuf ou dix-neuf ans près !

Pour moi, Angèle était le nom usuel utilisé par l'une des sœurs Brard. Or, il semble que cela ne soit pas le cas.

D'ailleurs, toute la vie de notre Angèle aura été un casse-tête à reconstituer. Une fois mariée le 2 mai 1913 à Teillé avec Alphonse Marie GOUTTIERE (1886), quelle n'a pas été ma surprise de retrouver l'époux et l'épouse, toujours mariés, chacun menant sa vie dans à des adresses différentes ! Voyez par vous-même :

Ainsi, en 1921, Angèle porte bien le nom de son époux ; il ne sont pas divorcés et habitent chacun une rue distincte. Alphonse semble avoir retrouvé sa famille car il loge chez Constance ROUINARD, apparemment sa demi-sœur.

Et la suite n'est pas plus cohérente :

En 1926, Angèle est dite veuve. Or, Alphonse habite toujours chez sa belle-sœur, rue Carnot...

Même constat en 1931 à part qu'Angèle n'est plus dite veuve.

En 1936, Angèle est toujours domestique chez Beaufils ; Alphonse, lui, n'habite plus chez sa belle-sœur ; il n'habite pas non plus avec Angèle. Il n'est pas décédé car il mourra en 1962. Pas de divorce, il est toujours considéré par la loi comme l'époux d'Angèle à son décès.

Apparemment, ils ont toujours vécu séparément. Un rapport avec ses blessures de guerre ? Avec les traumatismes qu'il en a rapportés ? Qui peut le savoir ?

La fin de vie d'Angèle est plus certaine : dans ses vieilles années, elle a vécu à l'hospice de Ballon et, sans doute malade, elle est décédée à l'hôpital du Mans le 1er juin 1978.

Parfois, une simple erreur, une incohérence peut vous perdre dans des recherches bien longues...

Note : Tous les documents sont issus des archives départementales de Blois.